La suspension de fonctions est une mesure dite conservatoire utilisée dans la fonction publique. Souvent vécue comme une sanction disciplinaire, elle permet de mettre temporairement un agent public à l’écart de son poste de travail tout en maintenant son lien juridique avec l’administration.
Fondements juridiques et objectifs
La suspension de fonctions est régie par plusieurs textes législatifs et réglementaires, notamment les articles L. 531-1 et suivants du Code général de la fonction publique, l’article 43 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux agents contractuels de la fonction publique d’Etat, l’article 36A du décret n° 88-145 du 15 février 1988 relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale, et l’article 39-1 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux agents contractuels de la fonction publique hospitalière.
La suspension vise plusieurs objectifs :
- Préserver le bon fonctionnement du service public : Éviter que la présence d’un agent faisant l’objet d’une procédure disciplinaire ou pénale ne perturbe le service ;
- Protéger l’administration : Assurer que le fonctionnaire suspendu ne puisse pas commettre de nouvelles fautes pendant la durée de l’enquête ou de la procédure ;
- Garantir les droits du fonctionnaire : En permettant une enquête approfondie tout en préservant son statut et ses droits.
La procédure de suspension
La décision de suspension relève généralement de l’autorité hiérarchique ayant pouvoir disciplinaire. La suspension étant une mesure conservatoire et non une mesure disciplinaire, elle n’a pas à être motivée, de même que l’agent ne doit pas obligatoirement être mis à même de consulter son dossier individue.
La suspension peut être prononcée dans plusieurs situations :
- Faute grave : Lorsqu’un fonctionnaire est présumé avoir commis une faute de nature à perturber gravement le fonctionnement du service.
- Mise en examen : Lorsqu’un fonctionnaire est mis en examen pour des faits susceptibles de constituer une faute grave ou une atteinte à la dignité de ses fonctions.
- Enquête administrative : Pendant la durée de l’enquête administrative visant à vérifier les faits reprochés.
Pendant la suspension, l’agent continue de percevoir son traitement indiciaire, son indemnité de résidence et son supplément familial de traitement, mais les primes et indemnités peuvent être suspendues.
La suspension est une mesure temporaire. Sa durée initiale ne peut excéder quatre mois, sauf si l’agent fait l’objet de poursuites pénales et qu’il ne peut ni être rétabli dans ses fonctions, ni affecté ou détaché sur un autre emploi. Dans ce cas, l’administration peut réduire le traitement indiciaire et l’indemnité de résidence de l’agent au maximum de moitié.
Conséquences de la suspension
L’agent public suspendu reste soumis aux obligations de discrétion professionnelle et de réserve. Il ne peut exercer une autre activité professionnelle incompatible avec son statut d’agent public, sauf autorisation expresse.
Qui dit suspension de fonctions ne dit pas nécessairement sanction disciplinaire. L’opportunité des poursuites disciplinaires dépendra des éléments reconstitués par l’administration notamment pendant la période de suspension.
La décision de suspension peut être contestée devant le juge administratif. L’agent public peut introduire un recours en annulation ou un référé-suspension pour faire suspendre la décision dans l’attente du jugement sur le fond.
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Anne Laure Vojique, Avocate associée